mardi 07 avril 2020
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La gestion d’une collection d’œuvres d’art en temps de crise

Transports freinés. Assureurs saturés. Expositions et événements annulés ou reportés.

La vie d’une collection d’œuvre est tourmentée à l’heure où le coronavirus se déploie dans le monde entier et gèle tout mouvement. Mis entre parenthèse bien avant le confinement officiel en France au 15 mars, le secteur a rapidement cessé d’exercer ses fonctions habituelles et a pris les mesures nécessaires pour palier à la propagation.

 

Premiers fermés, premiers adaptés à la situation hors du commun : les équipes se mobilisent, basculent en grande partie en télétravail, et prennent les mesures nécessaires avant blocage : derniers transports, mises en stockage d’œuvres, protections particulières. Il reste toutefois une poignée de métiers qui se rendent sur leur lieu de travail pour continuer à prendre soin des œuvres, s’assurer du bon déroulement du confinement en ces locaux. Conservateurs, régisseurs, directeurs… en fonction des institutions, des veilles sont réalisées dans les salles d’expositions en cours ou permanentes, où seuls les pas d’une personne résonnent dans un silence assourdissant.

 

Les œuvres graphiques sont recouvertes de tyvek et de couvertures pour les mettre à l’abri de la lumière. Les sculptures restent inertes, seule la poussière sera à négocier au retour des équipes, soit traités au fur et à mesure du confinement. Les peintures sont également couvertes de tyvek, pour les mettre à minima à l’abri de la poussière et de la lumière. Des œuvres fantômes parent désormais les cimaises silencieuses. Les œuvres en réserves font également l’objet de rondes, afin de surveiller toute anomalie, qu’elle soit sanitaire ou physique.

 

Le bâtiment n’est pas en reste. En effet, les entreprises de sécurité sont elles très sollicitées afin de perpétuer une surveillance constante sur les collections en l’absence du personnel, et notamment des gardiens de salle. Encore une fois, chaque institution mène sa propre politique, entre celles qui disposent de réserves externalisées chez des prestataires extérieurs, où la gestion des œuvres en réserve est in fine externalisée également, et ceux qui disposent de leurs propres espaces de stockage, à proximité des espaces d’expositions, in-situ, ou aussi externalisés mais pilotés en interne où, obligatoirement, le personnel de régie ou chargé de la gestion des réserves a le devoir de veiller sur les œuvres et le bâtiment au quotidien.

 

Quand les œuvres ne bougent pas, que font les conservateurs, chargés de collection ou régisseurs ?

Ce temps d’arrêt permet une mise à plat des dossiers pour certains : mise à jour des dossiers, point sur la gestion de la collection, rédaction de documents sur les œuvres, les artistes. Ils apportent également leur savoir aux productions de contenus et notamment numériques pour la communication afin de faire vivre et donner à voir les œuvres confinées. Mais la gestion d’une collection, c’est aussi une importante part d’administratif : dossiers de prêts en cours ou à venir ajustés en raison de la situation, les assurances se prolongent, les transports se reportent, les urgences sont réévaluées, les contrats se dotent d’annexes, tandis que les dernières acquisitions, dont les mouvements des œuvres sont aussi gelés, sont traitées sur le papier. Pour ceux qui travaillent sur des chantiers de collections et récolements, ce temps perturbé est mis à profit pour les mises à jour des bases de données, des documents inhérents aux œuvres et à l’informatisations d’archives par exemple, même à distance.

 

La mise en place d’outils de travail à distance efficaces, réunions et points hebdomadaires, synchronisation des données, tout cela prend du temps mais le lien est maintenue à l’ère du numérique, permettant la poursuite, pour la plupart et dans la mesure du possible, de ses activités.

 

C’est aussi l’occasion de préparer la programmation prévisionnelle des années à venir et d’avancer sur leurs commissariats. Préparer l’après, quand les portes rouvriront au cœur d’une société profondément transformée.

 

 

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